Les marchés boursiers ont terminé le 1er semestre sur une note plutôt optimiste. Les actions américaines restent principalement portées par les grandes valeurs technologiques soutenues par le déploiement de l’intelligence artificielle générative (IA). La profondeur du marché s’est néanmoins améliorée durant les dernières séances du mois de juin : les surprises positives sur le plan économique ont permis au reste de la cote de mieux performer après plusieurs mois d’apathie. L’épisode Wagner en Russie n’a eu que peu d’impact sur le moral des investisseurs toujours concentrés sur la trajectoire de la désinflation et les politiques monétaires. Les bourses européennes et japonaise ne sont pas en reste. Malgré des niveaux de valorisation exigeants et un scénario macroéconomique plus incertain dans la seconde partie de l’année, les investisseurs semblent préférer regarder le verre à moitié plein.
Le processus de désinflation s’est poursuivi. La forte contraction des prix énergétiques suivie par la décrue des prix alimentaires (essentielle pour les anticipations des ménages) est bien évidemment le facteur clé. L’inflation sous-jacente demeure néanmoins un sujet d’inquiétude pour les banquiers centraux. En zone euro, la Banque centrale européenne (BCE) prévoit désormais une inflation hors prix énergétiques et alimentaires de 5,1% en 2023 (contre +3,9% en 2022), soit une hausse de respectivement 50 points de base (0,5%) et 90 points de base par rapport à ses précédentes estimations de mars et décembre. En revanche, son estimation de l’inflation totale est en baisse de 90 points de base par rapport à sa prévision de début d’année à +5,4% (+8,4% en 2022), essentiellement sous l’effet de la sortie de la crise énergétique. Durant le mois de juin, les taux d’inflation totale et sous-jacente atteignent respectivement 5,5% et 5,4%. Si l’on observe une réelle accalmie sur le front des prix des biens grâce à la modération de la demande finale et à la normalisation quasi complète des chaînes logistiques (fin du choc d’offre, baisse des prix des matières premières hors énergie de 40% depuis leur pic de 2022, chute des prix du fret maritime), les tensions persistent dans les services, surtout en Europe. Cette situation n’est pas anormale puisque ces activités économiques ont rebondi bien après les secteurs manufacturiers au sortir de la crise sanitaire. Les États-Unis semblent quant à eux se diriger vers une inflation sous-jacente plutôt autour de 3%, grâce au ralentissement des loyers (poids important de cette composante dans les indices de prix) en décalage par rapport aux prix immobiliers. Nous notons que les anticipations d’inflation des agents économiques sont plutôt bien ancrées, ce qui reflète la crédibilité intacte des banques centrales. Toutefois, les pressions salariales affichent toujours un rythme proche de 4% par an (solidité des marchés de l’emploi), ce qui, en l’absence de gains de productivité, est difficilement compatible avec un retour à une inflation à 2% à plus long terme, l’objectif de la BCE et de la Réserve fédérale (Fed). Les banques centrales suivront donc l’évolution des coûts salariaux unitaires (rapport entre le coût et la productivité de la main-d’œuvre) comme le lait sur le feu.
Que pouvons-nous espérer du côté des banques centrales dans les prochains mois ? Gardons à l’esprit que les conditions de crédit se sont globalement resserrées (forte hausse du prix de l’argent et plus grande sélectivité des prêteurs). Dans la zone euro, la croissance du crédit bancaire est tombée à zéro, ce qui évidemment milite pour un scénario de croissance économique plutôt atone dans les prochains mois. Les marchés immobiliers et le secteur de la construction sont vulnérables. Aux États-Unis, la crise des banques régionales qui alimentent en crédits les petites entreprises et le poids élevé de l’immobilier commercial expliquent le discours plus prudent de la Réserve fédérale qui est sans doute à présent plus proche de son taux d’intérêt directeur terminal (5-5,25% pour les Fed funds aujourd’hui). Néanmoins, la Fed estime encore nécessaires deux hausses de taux supplémentaires (de 25 points de base chacune) et exclut pour le moment un pivot dans la seconde partie de l’année (assouplissement monétaire). Ainsi, la prudence de la banque centrale américaine à l’égard des conséquences économiques du resserrement des conditions financières est compensée par une vigilance toujours bien réelle envers le processus de désinflation. Les bonnes surprises économiques récentes, qui s’expliquent par la solidité du marché du travail, la capacité des entreprises à absorber les chocs macroéconomiques grâce à leurs profits élevés et l’utilisation par les consommateurs de leur épargne accumulée durant la crise sanitaire, masquent sans doute quelque peu les fragilités de l’économie américaine, ce dont la Fed est néanmoins bien consciente, et ce qui justifie la pause annoncée dans le processus de resserrement.
Du côté de la BCE, les « faucons » partisans d’une ligne dure (poursuite du resserrement de la politique monétaire) sont toujours influents (cf. les derniers commentaires de la présidente Christine Lagarde à l’occasion du forum de la BCE à Sintra), ce qui pose la question du risque d’erreur de politique monétaire (adoption d’une politique trop restrictive). Plus généralement, le comportement des taux d’intérêt à long terme semble toutefois refléter un consensus autour d’un scénario d’achèvement du resserrement monétaire en 2023 grâce à la confirmation du processus de désinflation, suivi d’une baisse des taux en 2024. La BCE devrait agir plus tardivement que la Fed puisque la dynamique désinflationniste est moins rapide en Europe. Selon les prévisionnistes de la BCE, l’inflation sous-jacente devrait afficher +2,3% dans la zone euro en 2025, mais encore +3% en 2024.
Face à un environnement macroéconomique plutôt incertain et particulièrement complexe à évaluer, les investisseurs sont surpris par la bonne tenue des marchés boursiers. En effet, le plein effet du resserrement des politiques monétaires, inédit depuis quarante ans, et le durcissement des marchés du crédit combiné aux politiques budgétaires généralement plus restrictives annoncent une activité économique plutôt atone dans la seconde partie de l’année, après un premier semestre meilleur qu’attendu et tiré par les services (en Europe, après une courte récession d’ampleur limitée liée à la crise énergétique, la dynamique est plus favorable sur le deuxième trimestre). Le rebond économique de la Chine, empêtrée dans ses problème structurels, perd de son dynamisme (effets plus limités des politiques publiques de relance, consommation décevante). Le seul facteur réjouissant est la poursuite de la désinflation alors que plus personne ne croit sérieusement au scénario d’une spirale prix-salaires comparable aux années 70. Il s’agit là d’un point fondamental pour la santé financière et le moral des ménages dont la consommation représente une large part du PIB des pays occidentaux.
Les marchés d’actifs risqués ont-ils dès-lors plus que largement anticipé les bonnes nouvelles ? Les primes de risque sur les marchés du crédit à haut rendement sont en effet plutôt historiquement basses, les volatilités observées sur les marchés sont faibles partout, et les indices des valeurs technologiques se déconnectent de l’évolution des taux réels à long terme en dollar (taux d’intérêt après inflation anticipée). Alors que les consensus des attentes bénéficiaires pour les prochains mois reflètent une absence de progression des profits des deux côtés de l’Atlantique, les marchés n’intègrent plus l’hypothèse d’une récession d’envergure mais seulement le scénario d’un atterrissage en douceur de l’économie avant un rebond l’an prochain (soft landing). Valorisées à 19 fois les résultats estimés pour les douze prochains mois contre une moyenne historique à dix ans de 17,4 (période durant laquelle les taux d’intérêt réels étaient plus bas), les actions américaines sont désormais vulnérables à une brutale réévaluation des risques de la part des investisseurs.
Or, si l’économie américaine a jusqu’à présent évité la récession, il n’en va pas de même du côté des profits (nous insistons sur la situation de Wall Street qui représente 60% de la capitalisation boursière mondiale). Depuis quelques mois, nous observons une normalisation progressive mais bien réelle de la profitabilité des entreprises américaines après la période exceptionnelle observée durant la phase de rebond post-Covid. Les entreprises avaient alors su habilement profiter du choc d’offre et de la demande de biens hors norme pour augmenter leurs prix de vente alors que l’inflation salariale est longtemps demeurée très inférieure à l’inflation totale. La situation a depuis fondamentalement changé. La normalisation des chaînes de valeur et l’absence de gains de productivité (qui s’explique aussi par la volonté des entreprises de ne pas licencier) alors que les salaires continuent de progresser au rythme d’environ 4% l’an, fragilisent les marges des entreprises (recul du pricing power). Au 1er trimestre, les profits agrégés ont déjà reflué de 7% pour une marge bénéficiaire nette de 11,5%, en baisse de 70 points de base sur les douze derniers mois. Le phénomène touche également le secteur de la technologie pénalisé par le retournement des dépenses dans l’électronique grand public et le ralentissement des investissements dans le cloud malgré le déploiement de l’IA générative. Le consensus des bénéfices s’attend encore à une contraction d’environ 5% des profits agrégés au deuxième trimestre. En résumé, la dynamique des profits n’est pas favorable. Le récent rebond des indices s’explique avant tout par le plafonnement des taux d’intérêt à long terme et la levée de quelques hypothèques (accord politique sur le plafond de la dette fédérale, diminution du stress bancaire). Signalons enfin que la perspective d’une dégradation de la profitabilité des entreprises ouvre la voie à une hausse du taux de chômage et donc à une fragilisation de la situation financière des ménages, ce qui compensera en partie les effets favorables de la désinflation sur la consommation.
Malgré les messages de prudence de quelques grands gérants d’actifs à l’égard de la surconcentration des marchés d’actions, Wall Street a continué sur sa lancée. Pourtant, si le poids du top 10 des actions américaines - largement dopé par le thème de l’IA générative, et qui explique l’essentiel de la performance boursière de New York depuis le 1er
janvier - représente près de 30% du marché, niveau proche de son sommet de la crise sanitaire, sa contribution aux profits agrégés n’est plus que de 20% contre plus de 30% au sortir de la pandémie. Le top 10 est valorisé à près de 26 fois les profits attendus à douze mois, contre à peine 16 fois pour le reste de la cote frappé d’apathie boursière depuis le début de l’année malgré les frémissements observés depuis quelques séances. Si la forte pondération de Wall Street en valeurs technologiques n’est pas nouvelle, nous estimons que le déploiement rapide de l’IA exige davantage de prudence de la part des investisseurs à l’égard de ses conséquences encore largement inconnues sur les métiers, vis-à-vis de la pérennité des positions concurrentielles de certains acteurs ainsi que du probable durcissement des régulateurs inquiets de la position ultradominante des hyperscalers (leaders du cloud). Nombreux sont les business models qui seront bouleversés par l’IA, y compris ceux du secteur de la technologie.
A ce stade, nous ne pouvons que renouveler notre conseil de circonspection du mois dernier toujours d’actualité.
La trajectoire de la croissance économique pour les prochains mois n’est pas particulièrement engageante pour les investisseurs : les profits agrégés ne progresseront que faiblement voire pas du tout alors que le pic de profitabilité exceptionnelle observé à la sortie de la pandémie est bien derrière nous. Les entreprises ont sans difficulté répercuté la hausse de leurs coûts sur leurs prix de vente, et même souvent bien davantage. Le consommateur final, aidé en partie par l’État, a payé une grande proportion de la facture du choc inflationniste. Or les marges bénéficiaires se sont déjà retournées aux États-Unis. Elles résistent encore en Europe, en retard sur le cycle américain. Si la pause monétaire de la Fed est bienvenue, les actions offrent peu de catalyseurs à court terme. Les marchés obligataires sont devenus des concurrents sérieux. Nous réitérons un message plutôt prudent en reconnaissant que le contexte actuel offre des opportunités sectorielles spécifiques.
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